Alors déjà, j'ai pas appuyé comme un psychopathe j'suis désolé. J'ai simplement optimisé mes mouvements pour appuyer sur tous les boutons à la suite.

"Ah donc toi t'es Ron t'es pipou et moi je suis obligé d'être Crabbe ET Goyle réunis ??? Ok pardon déso de parler le fourchelangue hein."

Prostré en silence dans la cage noire, j'attends que le temps passe? Je ne suis pas certain qu'on puisse trouver une solution, de toute façon, et c'est d'un ton résigné que je me décide finalement à répondre.

"Ma grande gueule, ma grande gueule... J'avoue ma grande gueule. Sorry."

Perso j'aime bien quand il fait noir comme ça, c'est devenu une habitude pour moi de discuter dans ce genre de situations qui apparemment ont décidé de m'arriver régulièrement hein. Enfin, pour faire la conversation ça a son charme en vrai. Puis bon, on finira par nous trouver, de toute façon. Que ça soit parce que quelqu'un voudra prendre l'ascenseur, ou parce qu'un sensitif sentira mon envie de pisser qui grandit. Parce que oui, j'ai envie de pisser là un peu. Mais on va penser à autre chose hein.

"Stylé en vrai, tu veux décorer les dortoirs du coup ? Parce que ça représente un peu de boulot quand même ça va pas être facile. Surtout bloqué ici, tu me diras. 22 ans hein ? C'est qu'il est tout jeune encore. Par contre donner cours à cet âge respect. Perso les gamins je peux pas trop les pifer mdr. C'pour ça mon premier taf ça a été de mélanger des alcools forts dans des verres, en général y a peu de gamins dans ce milieu. Et comme tu m'as demandé, je vais te répondre hein. Perso je venais voir une pote/collègue pour discuter boulot, et comme j'ai pas de réseau bah voilà, j'suis venu ici avant le taf pour essayer de l'intercepter. Enfin j'pense que du coup j'vais la louper mdr."

Merci de t'intéresser à moi et à mon envie de pisser, mec, ça fait plaisir. Je vous ai déjà dit que j'avais envie de pisser ? Au point que ma jambe commence à avoir de petits spasmes de pipi et à trembler un peu contre le mur à côté de moi. Je prends donc appuie sur mon coude pour me relever et me planter dans le coin opposé à Camil.

Zzzzziiip, puis un bruit de pantalon qui me tombe sur les chevilles-

"J'imagine que t'as pas de bouteille vide ou quoi ? tfaçon t'inquiète, regarde ailleurs au cas à la lumière reviendrait, et bouche toi le nez, avec mes pouvoirs je ferait disparaître toute trace de ce qui va se passer là. ET CROIS MOI SI JE POUVAIS ME RETENIR JE LE FERAIS BORDEL ! "

Mais il est bouché ?

- Mais t'es bouché ? Oui je me répète. J'ai dit "on", comme dans "nous deux". Putain t'es rapide à te vexer.

Bon encore une fois c'était gratuit, surtout qu'il essaie d'être sympa. J'ai déjà dit que la peur du noir me rendait agressif ?

- Ouais non, pas le dortoir entier. Les autres se débrouillent... Mais hé, c'est la première fois que je fête pas Thanksgiving avec mes parents alors je me suis dit que j'avais bien le droit d'égayer mon coin du dortoir. Et j'ai pas enseigné à des enfants, j'étais prof d'art et d'histoire de l'art à l'université de Dublin. Les jeunes avaient presque tous le même âge que moi. Je dis d'un ton bougon.

J'adore les enfants, ceci dit. Mais il s'est avéré que ce poste était ouvert alors j'ai candidaté et voilà. J'ai quand même de bons souvenirs de cette époque, malgré ce sentiment d'enfermement qui me rendait dingue.

- Ah ok, et du coup tu bosses dans qu- Je m'interromps en l'entendant baisser son froc.

Il va pas faire ça ? Il va faire ça. Le gars a vraiment oublié de troquer son cerveau de chien contre celui d'humain.

MAIS T'ES PAS BIEN ?! Rien à foutre que tu fasse disparaître après, t'es plus un gosse, retiens-toi mec ! Je proteste.

... On pisse pas comme ça dans un ascenseur ! Surtout quand t'es coincé avec un type que tu viens de rencontrer !

Avec l’opération qui débute bientôt, tous les Masters sont un peu tendus. Nikkou, lui, passe son temps à fabriquer des cristaux de téléporteur pour permettre à toutes les équipes de rentrer à Terrae au moindre problème. Et comme il est Téléporteur, à qui on demande de faire les aller-retours entre le QG des Anglais et Terrae, parfois juste pour trimballer du monde, leurs agents, le matériel ? Bon, je vous laisse deviner : c’est Nikkou, et s’il aime être actif, il aurait peut-être bien besoin de vacances après tout ça ! Peut-être qu’il pourrait demander à Yuuna de l’accompagner, et puis-…

Quand un collègue l’interpelle en lui disant “tiens, on dirait que l’ascenseur est encore en panne, Nikkou tu veux pas aller voir ?”, il a juste envie de plisser les yeux et lui répondre : “Heureusement que t’es Tonnerre aussi Aaron HEIN”.

Mais il est déjà parti “ouiii mais je dois chercher ma fille à l’école” alors qu’on est samedi, alors allons-y hein lol. Nikkou se téléporte puis s’approche donc de l’ascenseur en trottinant, teste. Hm. L’électricité se remet et se coupe, c’est bizarre là, il doit encore y avoir un Tonnerre qui a pété les plombs dedans et a tout cassé sans le vouloir. (Et si c’est volontaire, c’est pas cool pour lui ok.)

Haussant donc les épaules, et comme il sent de l’énergie Terraenne quelques étages plus bas, Nikkou se téléporte donc à l’intérieur de l’ascenseur et s’arrange pour rallumer la lumière, vu qu’il fait sombre… et là, il pousse un cri.

—WOAH.

WOAH.

NON MAIS. VRAIMENT ? VRAIMENT ? Non mais c’est bon, il est pas assez payé pour ces conneries, MAIS WOAH IL A VRAIMENT BAISSE SON FROC.

—RETIENS TOI NON MAIS. SERRE LES FESSES.

Et sans laisser à qui que ce soit le temps de réagir, le Master empoigne les deux personnes, toutes deux fichées délinquants à ses yeux, et se téléporte avec eux dans la forêt. Il aurait pu les bazarder dans les toilettes, mais au moins par terre sa pisse pourra pas faire de mal aux personnes qui s’occupent du ménage ! NON PUIS IL FALLAIT REAGIR VITE LÀ, OH.

À la lumière réelle du jour, Nikkou a le temps de bien constater qu’il s’agit effectivement d’Erik, assez reconnaissable somme toute. Il le juge du regard, bras croisé, puis fixe l’autre jeune personne aux cheveux longs, comme si lui aussi avait été en train d’uriner partout.

—Quand même, c’est pas difficile de se retenir ! Je sais pas ce que vous fichiez dans cet ascenseur, mais, non en fait, vous savez quoi ? Je vais vous laisser là, débrouillez-vous pour rentrer à l’institut. (Puis il pointe Erik du doigt.) On en rediscutera demain à l’entraînement.

Et sur ce, il se téléporte pour retourner s’occuper de l’ascenseur qu’ils ont probablement DÉTRUIT. Peut-être qu’il a uriné dessus en fait ?? Mais quel enfer, s’il y a une seule goutte de pisse dedans, il le dégomme devant toute l’équipe le lendemain, c’est clair. Il fera moins le malin !!

J’espère que t’as bien froid aux miches, Erik, bordel.

"OH NO NO NO MAIS PU-

Changement de décor.

-TAIN MAIS NIKKOU JTE JURE J'ALLAIS NETTOYER APRES !!! "

Le froid. Enfin. Le froid inattendu me fait serrer les fesses.

"Putain mais chef LE PIPI C'EST DE L'-

Et il disparaît.

-EAU ! "

Bon et puis merde hein. De toute façon à aucun moment j'ai tourné la tête, j'suis bien à fixer la branche qui pend à 5 cm de mon œil. On va faire son meilleur pips pendant que Camil vide son estomac sur l'humus gelé de la forêt. Putain mais l'affiche bordel de merde je vais passer pour quoi demain moi ? Genre j'ai même pas eu la possibilité de me justifier. ET PUIS EN PLUS LÀ POUR VOIR ARIA C'EST MORT. Oh et puis Elwynn va bien se foutre de ma gueule. Et Aoi. Oh bordel de merde. Oh tien. Je regarde la buée engendrée par la chaleur de mon urine passer au dessus de ma tête, puis une fois mon affaire faite, je remonte mon froc. Putain Aoi va me défoncer. Et j'vais avoir du mal à le justifier. La carte de l'entraînement risque de pas passer. Puis j'étais dans le noir il pouvait pas voir mon cul et je lui avait demandé de tourner la tête. Je soupire quand j'invoque un peu d'eau pour me laver les mains, et m'approche du Novice.

"Première fois, hein ? Dis toi que même en le faisait 20 fois par jour j'ai encore envie de vomir à la fin. Tu veux te rincer la bouche ? "

Je mets 2 secondes à capter que ça pouvait être bizarre comme sortie dans  ce contexte.

"Je euh. J'ai fait ce que j'avais à faire et j'ai les mains propres. J'te demande pas de boire ma pisse j'suis pas un gros dégueulasse. Enfin. Aux yeux de l'équipe si. Et probablement aux yeux de tout le corps enseignant, et de tous les masters, et de tous les potes de tous ces gens. Ok ma vie est foutue parce que j'avais envie de pisser en étant bloqué dans un ascenseur. Bordel."

Je me laisse glisser dos contre un tronc, et m'assieds par terre. De toute façon mon futal est déjà sale hein, merci la TP dans une flaque de boue. J'ai froid au cul, mais ça compense avec le chaud que j'ai aux joues à cause de l'humiliation.

La lumière, la voix, et zap. J'y comprends rien. J'étais dans l'ascenseur, et maintenant je suis dans une forêt. Je crois qu'on a été téléporté...

Le gars qui nous a sorti de l'ascenseur nous jette pose sur le sol boueux. Erik se fait engueuler, et moi je me fais juger. Mais j'ai rien demandé ! C'est pas moi qui suis cul nu dans la forêt parce qu'il était prêt à pisser devant un parfait inconnu. Bordel à cause de cet imbécile, je suis fiché pour le reste de mes jours ! Mais j'ai plus urgent, je sens que mon estomac se soulève.

- Oh bordel je vais être malade. J'ai juste le temps de marmonner.

Je me penche près d'un arbre et rends le peu que j'ai mangé depuis le matin. Je me remercie d'avoir attaché mes cheveux ce matin. J'ai l'impression que mon estomac se rebelle contre le traitement reçu avec la téléportation. Parce que ça peut être que ça. De la téléportation. Bordel, pitié faites que je sois pas un futur téléporteur... Je vais détester ça.

Erik revient à la charge. Oui, mon gars, première fois à être téléporté. Et dernière, je l'espère. Et voilà qu'il recommence à parler de ses mésaventures urinaires... L'agacement prend le dessus sur mes nausées.

- Stop. Arrête de parler de ta pisse. Sinon je te vomis dessus. Je le préviens.

J'ouvre ma sacoche et je sors ma bouteille d'eau. Une fois que j'ai rincé ma bouche et mis un peu d'eau sur mes poignets, ça va un peu mieux. Je regarde un peu autour de moi, mais impossible de savoir exactement où on est. Heureusement que je suis pas frileux parce qu'en t-shirt à manches courtes en décembre...

- Bon, on essaye de retrouver notre chemin ? Je propose.

Je lui tends la main pour l'aider à se relever. Pitié faites qu'il ait pas menti et qu'il ait bien nettoyé ses mains...

J'écoute rien, perdu dans mon désespoir. Puis je regarde la main tendue du Novice pendant une poignée de secondes, sans comprendre. Je euh-

"Merci. Putain. C'était une chouette existence hein ? Enfin une chouette fin d'existence."

J'attrape sa main et me redresse, les fesses déjà humides a cause de l'état de mon pantalon. On dirait j'me suis chié dessus putain. Tout ça parce que j'suis un mauvais Morphe... Je marmonne quelques mots :

"Si seulement j'pouvais vider ma vessie sans que ça ai à sortir avant j'aurais pas de problèmes. C'est juste de l'eau un peu jaune quoi..."

Oui bon allez ok, ma vie est foutue. Mais oh, pour l'instant personne le sait hein ! Ça sera sa parole contre la mienne. Faut juste s'assurer que le témoin sera muet...

"Je dirais que c'est par là. Après de toute façon, on marche dans une direction. Et puis on fini par tomber soit sur le village, soit sur la barrière. Et dans le pire des cas on suit la barrière."

Je me dirige dans la direction que j'ai pointé du doigt, les mains dans les poches et les pieds trainants par terre, tête baissée. Il me faut un plan pour le faire taire et essayer de sauver mon honneur. Oh mais-

"Bon j'imagine que là tout de suite tu as pas super faim. Mais la nausée passe rapidement en général. Le temps de retrouver le chemin tu devrais crever la dalle. J'dois avoir des gros restes de curry à la maison, et de quoi noyer la moitié de Terrae dans leur propre vomi après un coma éthylique."

Et une fois qu'on sera à la maison, je te ferais promettre de ne plus jamais parler d'un gars cul nul dans l'ascenseur, sinon eh, y a pas beaucoup d'endroits où peut se planquer un Novice, la nuit. Pourquoi je peux pas juste me taire par contre, c'est trop une dinguerie ce besoin de se justifier...

"À la base il faisait noir j'voulais juste être confortable hein, je voulais pas te montrer mon cul. Et t'aurais rien entendu, quand j'suis bien concentré j'arrive à le faire disparaitre avant qu'il touche le sol. Après comme il faisait nuit ptete j'aurais galéré, mais on saura jamais hein. En vrai ptete ça aurait sentit un peu l'ammoniaque quand même je sais pas. En vrai j'ai jamais essayé j'ai menti. Mais j'avais trop envie et je voulais pas vivre cette épreuve la vessie sur le point d'exploser, j'aurais été encore plus désagréable sinon... Désolé hein. Vomis pas."

Je redresse Erik. Il a le cul tout boueux, mais je préfère la boue à la pisse. Par contre... Pourquoi il parle d'une fin d'existence ? Et puis, "chouette", parle pour toi ! J'ai gerbé, je me retrouve avec un imbécile heureux exhibitionniste et pisseur en série. Perdu dans les bois. C'est digne d'un film d'horreur !

Et le voilà parti. Direction ? "Par là"... On est pas près d'être sortis d'ici. Mais je préfère reposer dans une forêt plutôt que dans l'ascenseur. Faites qu'on tombe sur le village, par pitié. J'ai même plus envie de manger, je veux juste rentrer- Alcool ? Ok, j'ai rien dit.

- Mon gars, je vais t'assécher ta réserve. Rien que pour me venger. Je dis avec un sourire cruel.

Et en marchant le revoilà qui parle de sa pisse. Sérieusement, je vais finir par l'appeler Pisse-partout. Et il a le culot de terminer son monologue urinaire par un "Désolé hein. Vomis pas." Je suis presque tenté de lui vomi dessus là maintenant tout de suite. Mais en vrai, j'ai plus envie. Ça va mieux, et puis de toute façon j'ai plus rien dans le ventre.

Nah t'inquiètes. Pas tout de suite. Une fois que j'aurais mangé et bu, là je garantis rien. Je dis d'un ton tranquille.

On continue à marcher un moment sans rien dire. Le silence est un peu bizarre d'ailleurs. Tellement que je finis par me sentir obligé à relancer la conversation...

- Bon et sinon, t'es là depuis longtemps ?

Oui c'est cliché je sais... On fait avec ce qu'on a et là j'ai pas grand chose, je me sens un peu violé dans mon cerveau avec les derniers événements.

"Sachant que l'alcool déshydrate, c'est toi qui risque de finir en umeboshi

*:

Peu importe à quel point t'es solide."

Je n'ai absolument aucune idée d'où on est exactement, mais en vrai m'en fiche, ça fait du bien de prendre l'air après avoir été coincé dans un ascenseur pendant environ 3 minutes. Au moins le type me suit, j'm'en voudrais d'avoir sa disparition sur la conscience. Putain mon caleçon me rentre dans le cul c'est pas agréable. Nikkou, enfoiré.

"Ahah quand t'auras bu la seule chose qui pourra sortir de ta bouche ça sera des compliments sur mes cocktails, ou alors c'est que t'es de mauvaise foi. T'avais l'air de mauvaise foi un peu tout à l'heure, après, avec cette histoire de téléphone dans le cul et tout. Dans le doute je vais me méfier et rester un peu devant, le prends pas mal."

J'sais pas pourquoi mais j'ai envie de le taquiner un peu. C'pas vraiment du bizutage, j'crois. Sinon j'aurais pissé sur ses converses, ouaip. J'ai vu ça dans un film.

On avance un moment, pas très vite parce que je traîne un peu des pieds, j'avoue. Elle est si grande que ça la forêt, de base ? Ou on se fait prank ? Faut que j'arrête de regarder des docus sur les théories du complot moi ça me réussi vraiment pas. La voix de Camil me sort de mes pensées.

"Ça va faire 5 ans, bientôt. Les 5 meilleures années de ma vie. Et en 5 ans, ça va être déjà la seconde fois que la rumeur comme quoi j'serais ptete un nudiste ou pire, un exhibitionniste, va se répandre. C'est pas vraiment une statistique dont je suis fier, j't'avoue. Désolé encore. Promis je sais me tenir, en vrai."

J'me retourne pour faire face au blondinet, et j'essaie tant bien que mal de me sortir mon calecif de la raie.

Ouais bon bah eh, j'sais bien que c'est pas très élégant. Mais j'ai pas l'habitude de porter des strings encore. Enfin je porte pas de strings, justement. Du coup quand- Enfin bref, ça me rentre- fin. Yes. Tu te plaît, ici, pour l'instant ? T'as rencontré des gens sympas ? J'm'inclus pas dans la liste tkt."

Ah. on sort ENFIN de la forêt pour se retrouver face à la grille.

"Maintenant c'est plein Nord, cet enfoiré il nous a déposé à l'opposé du lac. Du coup forcément je connais moins. Par contre ça veut dire qu'on est moins loin de chez moi."

MOI, de mauvaise foi ?! Ce gars a vraiment fumé la moquette ! C'est lui qui a créé cette foutue situation ! Bah tiens, puisqu'il parle de cul...

Je lui lance un regard lourd de sens.

- Tu devrais pas tourner le dos à quelqu'un que tu connais pas... Qui sait ce qui pourrait se passer si tu marches devant...

Eh, quoi ? Y'a pas que lui qui peut taquiner. J'ai aucune envie de faire quoique ce soit avec un type qui vient de me faire un monologue sur son envie de pisser. Mais il l'a cherché.

Bon au moins il a la décence de répondre à ma question avec un minimum de sérieux. Et de s'excuser à nouveau. Il remonterait presque dans mon estime.

- Si tu veux mon avis on est plus sur des faits que sur une rumeur à ce niveau-là mais eh, chacun ses défauts comme on dit. Je dis en haussant les épaules.

Et juste au moment où je me dis qu'il est peut-être pas si vulgaire... Mec, je te vois hein, pas la peine de te tourner vers moi pour faire genre. ET PAS LA PEINE DE TE JUSTIFIER NON PLUS ! Au même moment on arrive devant le mur d'enceinte. Plein nord donc... Je ne connais pas vraiment l'endroit mais peu importe, au moins on a le temps de discuter d'autre chose que des déboires d'Erik.

- Je ne sais pas vraiment encore si je m'y plais. J'ai un peu tout quitté sur un coup de tête, et même si mon ancienne vie était une véritable cage, certains aspects me manquent. Je dis honnêtement. Mais oui, j'ai rencontré des gens sympas. Je pense à la petite Pricie, Luna qui a eu la gentillesse de m'expliquer comment Terrae fonctionne, Hua que j'ai accueillie... J'aimerais bien la revoir tiens d'ailleurs. Puis Candence ! Je suis arrivé le même jour qu'elle alors on a exploré ensemble.

Et puis il y a eu Halloween. Bon, c'était un beau bordel, j'ai vu beaucoup de gens sans vraiment me lier d'amitié. Et... Attends un peu...

- Mais mec. C'était pas toi le type à Halloween qui s'est pointé au bar déguisé en Bob L'éponge ?! Je demande alors que les souvenirs refont surface.

Je ricane, jetant un regard en arrière après les menaces du jeune Camil.

"Tu vas me faire des chatouilles avec tes petits poings musclés ? C'est ptete pas par là, mais suis-moi ! "

J'repense à mes premiers mois à Terrae, à quel point j'ai eu la chance de tomber très vite sur des gens géniaux, avec qui j'ai pu partager rapidement des moments forts et me lier d'amitié. Leurs visages et leurs noms défilent dans ma tête, me volant des sourires à chaque nouvelle tête.

"Bah eh oh, j'te permets pas ! C'était au lac ma serviette est tombée pendant que je me changeais... Et puis là j-"

Je m'interromps en me grattant l'arrière de la tête, parce que je sais très bien que ça ne sert à rien que j'essaie de me justifier encore une fois. Fucking normies wsh. Je l'écoute me raconter ses premiers jours chez nous. Et un détail sur le "avant" m'interpelle, mais je ne vais pas commencer par ça.

"Ça fait déjà un joli comité d'accueil ! Franchement t'aurais pu tomber sur de ces bolos, t'es un veinard t'as pas idée ahahah- Et tu verras, ce qui te manque, il y aura un moment où tu le retrouvera, d'une manière ou l'autre ! "

En vrai, c'est le mot "cage" qui m'a fait tiquer. Peut-être que je place trop du jeune Erik binoclard, aux cheveux teints en noir pour rentrer lui même dans la cage ? Sans doute. Mais j'ai la fâcheuse manie de mettre le nez des gens dans leur Vide et déjà que j'ai vachement trop approché mon cul de son nez, j'vais pas en plus lui chatouiller les narines avec un bon fumet de pré-Terrae.

"HEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEE KIVI DAN 1 ANANAS DAN LA MER BOB LEPONJ KARE."

J'ai perdu 40 poins de QI jcrois la température du mois de décembre est plus smart que moi actuellement.

"Ouaip c'est moi. T'étais là ou- j'essaie de me concentrer un moment sur mes souvenirs de la soirée. Souvenirs pas forcément intacts, qui plus est. Ah mais si ! "T'étais le gars sans costume avec des moustaches au feutre qui s'efface pas là nan ? Le gars qu'étais accoudé au bar avec moi à un moment ? Ahah on va bien s'entendre alors toi et moi. J'espère l'année prochaine t'auras un vrai costume quand même. AH TIENS REGARDE. On aperçoit le village des Master derrière ce bâtiment !""

Je ne sais pas si je n'ai pas été assez clair ou si, étonnamment, Erik est plutôt du genre innocent, mais le gars a absolument pas saisi mon sous-entendu. Tant pis. Puis je pense que même si j'ai l'air d'une brindille comparé à lui, il se rends pas vraiment compte que je pourrais faire plus que le chatouiller.

Enfin, bon tant pis. Par contre j'avoue qu'il me fait éclater de rire avec son indignation.

- Laisse tomber, mec. Il faut vraiment que t'arrêtes de te justifier à chaque fois. Je le taquine.

Il marche pas, il court à ce niveau-là. C'est trop drôle.

- Par contre, pour ce qui est de tomber sur des boloss... T'es pas mal dans ton style je te ferais dire. Je plaisante.

Mais c'est vrai, je suis tombé sur des gens sympas. Ça a d'ailleurs rendu mes premiers mois ici très agréables. Je pense que je vais souvent retourner au bar, histoire de boire un coup tranquille et de discuter avec Luna si elle n'est pas trop occupée. C'est une chouette femme, vraiment.

Par contre Erik a vraiment des neurones en moins, parce que dès que je lui parle de son costume Bob L'éponge, le voilà qui me beugle dans l'oreille le générique dudit dessin animé. Pitié... Faites qu'on sortes vite d'ici.

Ouais, ouais c'était moi. C'est une des serveuses, celle déguisée en cochon qui me les avait dessinées sans faire gaffe au stylo. J'ai gardé des traces pendant des jours après ça ! La seule chose qui les a effacées c'est du dissolvant. Et franchement ça fait pas du bien à la peau. Je lui réponds.

Si seulement ça pouvait faire partir mes taches de rousseurs, je serais tellement heureux. Mais bon, on a pas tout ce qu'on veux dans la vie. Déjà je ressemble plus à un Naruto à cheveux longs. Et en effet on commence à voir des maisons qui pointent derrière un bâtiment lugubre.

- An parce que tu squattes chez un Master ? Beh dis donc, je le plaindrais presque ! Je plaisante pour le taquiner.

En vrai ça doit être super cool, même si c'est qu'une coloc', d'avoir sa maison. Sérieux, après quelques mois en dortoirs, je donnerais tout pour avoir mon espace. Mon royaume pour une chambre privée !

"Ouais j'sais que je devrais pas, mais en même temps j'ai pas envie de passer pour un gros dégueulasse..."

Oui je m'enfonce encore j'sais bien mais ça me suivra toute ma vie cette histoire, j'suis sûr. Genre si un jour j'me marie t'sais. "Vous pouvez embrasser la mariée. À moins que vous préféreriez nous montrer votre cul et pisser dans le bénitier ? " Trop c'est trop la vie de ma mère. Et faut vraiment que j'arrête avec cette expression, ça donne trop d'importance à cette salope. 'fin bref.

"Boloss peut-être, mais boloss gentil ! Et franchement ça fait une sacrée différence. Toute cette histoire à la base c'est quand même parce que je t'ai laissé me faire des gratouilles entre les oreilles, c'est après que les conséquences de tes actions nous ont, de fil en aiguille, entrainé jusqu'à cette forêt de malheur."

J'suis désolé pour ses oreilles par contre le générique de Bob l'Eponge c'est quelque chose de sacré, on ne peut pas ne pas au moins le chantonner quand on l'a en tête.

"Nan mais j'pense que Peppa Pig s'est foutu de ta gueule, le feutre indélébile sur la peau ça accroche ptete plus qu'un feutre normal, mais c'est loin d'être indélébile. Du coup ça devait être autre chose, ou un mélange chelou. Ptete même qu'elle voulait tester un nouveau maquillage, et qu'elle est pro vegan, et qu'elle vengeait tous ses compères cochons qui servent de cobayes pour certaines compagnies pharmaceutiques, ou de make-up. T'y a pensé à ça ? Après ouais, dans la veine du dissolvant pas sympa pour la peau, y a le liquide vaisselle sous les bras. Vraiment, fais jamais ça. Ou alors j'ai ptete juste la peau sensible en vrai. Mais eh, j'avais plus de gel douche et je devais me rendre présentable pour une demoiselle. Je referais plus l'erreur."

On sort enfin de la forêt, je commençais à en avoir marre de ces foutus arbres. J'en ai toujours moins marre que de mon sous-vêtement trempé et souillé de boue et d'eau croupie glacée, au même titre que mon pantalon. Nan parce que ça m'a coulé le long des cuisses entre temps, et j'vous jure c'est pas agréable du tout du tout.

"C'est toute une histoire en vrai. Mais oui, j'suis en coloc' avec Ipiu, la Master en fauteuil roulant que bosse à la bibliothèque ! Bon c'est pas gratuit, mais on va dire que je paie en nat- En euh- services. Comme elle est en fauteuil, j'l'aide vachement pour les tâches ménagères."

C'est une des rares choses pour lesquelles je peux remercier ma daronne. J'sais faire les tâches ménagères, et ça me dérange pas. Surtout qu'avec Onee-chan j'risque pas de me faire taper dessus quand c'est pas super bien fait ou que j'oublie.

"Et euh tu vas encore dire que je me justifie, mais quand j'ai failli dire en nature c'est parce que c'est l'expression t'sais mais oh, on s'est rencontré dans un Love Hotel avec Piu, et y a jamais rien eu, j'le jure ! "

Le revoilà qui s'enfonce... Bon cette fois je ne vais rien dire, ça ne sert à rien, vraiment... Puis le pauvre on va lui donner un petit coup de main pour se sortir de cette histoire. Parce que là, je n'aurais même pas besoin d'ouvrir ma bouche si il continue à se justifier comme ça. Donc je marche en regardant où je mets les pieds. Avec la boue le chemin glisse un peu et j'ai aucune envie de terminer comme Erik, les fesses poisseuses. Par contre il faut vraiment qu'il arrête de me refourguer toute la faute !

- Eh dis donc ! Je te signale que c'est toi qui a appuyé sur tous les boutons à la suite. Si t'avais pas fait ça on serait monté au premier, je serais allé faire mes décos et toi t'aurais pu continuer ton chemin. Alors tes remarques tu te les gardes. Je réponds.

Le gars a déjà enchaîné sur autre chose alors que mes oreilles sonnent encore de sa grosse voix qui chante Bob l'Éponge... Je crois qu'il commence à me fatiguer. Je veux dire, physiquement. Et le revoilà qui me partage sa vie. Non mais sérieux, du liquide vaisselle sous les bras. Qui fait ça ? Bah lui, visiblement.

On sort de la forêt et le revoilà lancé. Sa coloc' avec une Master en fauteuil roulant, sa rencontre dans... un Love Hotel ? Je connais pas vraiment mais vu le nom, et vu ce qu'il me dit avant, je crois deviner la fonction de ce genre d'hôtel... Je lève les mains en signe d'apaisement.

- Tu sais mec, tu fais bien ce que tu veux... Je vais pas te juger. Enfin, tant que tu n'essaies plus de pisser dans la même pièce que moi... Par contre, la vache comment tu parles tout le temps. Ça te fatigue pas ?

Parce que moi, si, en l’occurrence. Et je commence à avoir un peu froid, en t-shirt en plein hiver... Vivement qu'on arrive. Je me réchaufferais vite avec un peu d'alcool.

Gnagnagna mes remarques je me les garde ok bah super. J'essaie de faire la conversation Et non pas de me justifier et c'est comme ça qu'on me remercie. Noté, noté. Nan puis parler ça me permet de ventiler un peu, comme les chiens avec leur langue dehors en été. Marcher ça me donne vite chaud J'sais bien qu'il fait pas chaud, j'le vois aux petits poils qui se dressent sur les bras de mon compagnon d'infortune. Je retire ma veste, la roulant en boule et lui la lançant au milieu de la poitrine.

"On est bientôt arrivés. Enfile ça, j'ai l'habitude de faire mon sport en short/t-shirt même l'hiver. Mais j'voudrais pas que tu t'enrhume par ma faute. Et t'façon y a rien à juger, il s'est vraiment rien passé, sinon on serait pas colocs', elle serait tombée raide dingue de moi c'est évident. Et d'habitude je parle vraiment pas autant, j'sais pas, ça doit être le fait d'être de bonne humeur, on va passer une bonne soirée toi et moi tu vas voir ! Tiens regarde, c'est la maison, là, avec le Jacuzzi sur la terrasse ! "

J'crois même deviner la forme de Tifa qui se prélasse dans les quelques rayons de soleil qui percent les nuages, sur la terrasse. On y est bientôt !

"Nan puis en vrai t'as l'air de me juger de fou depuis tout à l'heure, sans doute à raison mais eh ! Du coup quand j'dis un truc j'préfère expliquer bien le contexte et tout sinon tu vas penser que j'suis un malade alors qu'en vrai j'suis gentil et cool ! Mais du coup pour en revenir à cette histoire de Love Hotel, en fait, Onee-chan a voulu se faire passer pour une détective privée, et elle m'a entrainé dans une fausse enquête à la con où on a pris des gens innocents en filature jusqu'au Love Hotel, tu vois ! Et au moment où on prend une chambre pour continuer la filature, elle me dit que j'suis vraiment un boloss et du coup je saute sur le lit et ça rebondit et elle me fait un câlin et on s'endort et on est devenus copains comme ça."

Bon ok c'était pas super clair comme fin d'histoire. Mais y repenser ça me fait sourire, malgré mon cul crotté. Puis on arrive quasiment dans notre rue du quartier résidentiel. Let's goooooo. Je place deux doigts dans ma bouche et siffle pour faire coucou à ma petite sœur, que je vois se relever tranquillement et trottiner vers nous, attendant patiemment au portillon qui donne accès au jardin. Je lui l'ouvre et lui flatte la nuque avant de me diriger vers la porte d'entrée. Merde. Mes clés- Ah oui.

"Les clés sont dans ma veste normalement, tu peux me les passer Cam stp ? "

Je reçois une veste plein torse, mais je la mets sans moufter. Ok, il est bizarre, mais pas méchant. Sur ce point, je dois avouer qu'il a raison. Je l'écoute en marchant tranquillement. C'est vrai que malgré moi j'ai hâte de passer la soirée avec Erik. Je sens que ça va être marrant.

Quand on passe dans une rue résidentielle, je lève les yeux de mes chaussures pour apercevoir une belle maison avec en effet un jacuzzi. Et une forme noire qui se prélasse dans la petite tache de soleil. Je crois que c'est un chien. Si c'est un chien, je vais craquer.

J'écoute son histoire d'une oreille distraite en m'approchant de la maison. Oh my god, c'est vraiment un chien. Je veux le caresser ! Je veux !

- Eh, promis je te juge pas. Enfin, je pense mais c'est pas vraiment du jugement. C'est chou comme histoire et comme rencontre en plus. Je comprends que tu aies fait une coloc' avec elle. Je dis.

Erik siffle et le chien se lève et vient l'accueillir. Je suis Erik et fouille dans les poches de sa veste. Je lui lance les clés que j'y trouve sans m'attarder sur le reste. Pendant qu'il ouvre la porte d'entrée, j'en profite pour m'accroupir et faire des papouilles au chien. Puis d'un seul coup, j'ai un doute.

- Euuuh Erik ? C'est ton chien hein ? Genre, je veux dire un vrai toutou, qui fait wouf et qui rapporte la balle ?

On dirait bien que Terrae m'apporte aussi des problèmes de confiance. Je sens que dans les semaines à venir je vais soupçonner tous les chiens que je vais croiser d'être des Eaux... J'espère qu'on ne m'internera pas pour avoir demandé au prochain toutou que je verrai s'il est humain. Ça la foutrait mal.