Il s’agit de la suite de ce RP :  Ici

On se retrouve soudainement sur le toit après avoir fait un arrêt vif chez Erik. Le toit est vide. Il n’y a que nous et le vent frais nous fait du bien. J’ai les oreilles encore un peu sifflantes, s’habituant soudainement au silence total, loin de la ville. Loin de la foule. Loin de qui que ce soit. Erik voulait voir les étoiles alors on est venus ici, bières en main. Le ciel est dégagé et bien que Terrae soit à Tokyo, peut-être nous aurons la chance au moins de voir quelques points lumineux nous sourire. La lune est un croissant ascendant magnifique au dessus de nos têtes. Il n’est pas tant lumineux mais sa beauté m’émerveille.

Je dépose mon sac à terre et croise les bras en regardant le ciel.

« C’est déjà un peu plus visible ici qu’en plein centre-ville quand même, dis-je dans un sourire. »

Erik me tend une bière que j’accepte et ouvre dans un bruit sourd. La soirée se déroule à merveille, ne laissant que des traces de douceur dans nos sourires. Malgré les vagues d’émotions qui nous ont déstabilisé un moment, qui nous ont fait nous poser milles et une questions sans comprendre vraiment ce qui se passait… Ce n’était qu’une prise de tête, rien de bien grave. Je suis étonnée que ma colère n’ait pas pris le dessus au point que je le plante en plein milieu du repas mais je pense que j’ai pris suffisamment de maturité pour arrêter un peu mes conneries. Ou bien peut-être juste que je voulais que les choses s’arrangent avec Erik parce que… je l’apprécie ? Ouais. J’imagine. Pour le moment on passe plus de temps à se fréquenter que de simplement juste coucher ensemble. Bien que les deux cas me conviennent. Enfin, je crois. J’en sais rien. Je m’empêche de réfléchir ce soir. Pour qu’on puisse passer du bon temps ensemble, quitte à pouvoir regarder Le Soleil se lever ensemble. Sans penser au lendemain.

Je m’allume une cigarette, mon regard ancré dans le ciel avant que je daigne le descendre pour l’amarrer dans celui d’Erik, un sourire en coin.

«  C’est une bonne idée d’être ici, qu’est-ce que t’en penses du ciel ? Ce n’est pas la Namibie mais on peut voir quand même quelques trucs ! »

Je suis accoudé à la rambarde qui longe la bordure du toit, les yeux levés vers les quelques étoiles qui peinent à tirer leur épingle du jeu dans ce ciel trop éclairé. La Lune est discrète, presque autant que la note sucrée dans ma bière. Une cigarette au bec, je me repasse le film de la soirée. L'arrivée de Nana, ses cheveux ondulés qui rebondissent sur ses épaules, sa peau de miel cachée mais pas trop par une tenue qui lui va si bien, ses lèvres d'un rouge qui, même factice, avait attisé mon désir plus que de raison. Après quelques baisers et cigarettes, il fallait reconnaitre que sa présence avait été de courte durée. Ce repas copieux, délicieux. Nos mains liées toute la soirée. Vraiment. Tout le repas, toute la route du retour, même pendant ce petit concert improvisé dans la rue, où on a "dansé". Il y a bien eu cette petite tension, quand elle a appris que c'était mon anniversaire et que je n'avais rien dit, mais on était vite passé à autre chose, une fois qu'on en a discuté un peu. Discuter. C'est probablement la solution à tous nos maux. J'veux dire. On les ignore vachement bien. Mais on a un soucis, au moins. Celui de cette promesse de merde. Une gorgée de bière, une taffe de ma clope et je me tourne vers elle quand sa voix résonne.

"Disons que c'est mieux que rien- Je souris -et que le cadre et la compagnie jouent beaucoup."

Je change ma bière de main pour la tenir sous ma cigarette, et passe ainsi ma main libre sur sa joue.

"J'ai déjà fait un vœu ce soir, mais je rêve d'une étoile filante, pour en faire un nouveau- Tu ferais quoi, toi, comme vœu ? "

Nouvelle gorgée de bière. Faut croire que manger autant me donne soif.  Je me demande à quoi tu penses, Nana, pendant que tu réfléchis à ma question. Est ce que c'est vraiment ton premier choix, qui va sortir d'entre tes lèvres ? Est ce que tu te demande ce que tu peux dire pour m'impressionner, me charmer ou juste ne pas aborder ce sujet, ce qu'on est, toi et moi. Je suis curieux. Mais je suis surtout content que tu sois là, malgré l'incertitude et le doute.

Je lui offre un large sourire, sûrement parce que les étoiles qui nous importent ce soir c’est tout simplement nous même l’un pour l’autre. Mais la vue des quelques étoiles qui s’offrent à nous c’est déjà une petite victoire. C’est si calme. Reposant. Chaleureux parce que t’es là. Et que j’apprécie de me remémorer chacun des instants qu’on puisse passer ensemble, à chaque clignement des yeux tu te caches sous mes paupières. Je garde la clope au bec le tend d’effleurer sa main qui s’est posée sur ma joue avant de la reprendre entre mes doigts, soufflant la fumée du nez.

«  Un vœu hm… »

Je pars en réflexion sans trop savoir ce que je pourrais souhaiter. Le retour de Max ? Un salaire plus élevé ? D’avoir simplement du temps à l’infini en ta compagnie ? Je m’en mords la lèvre sans savoir exactement ce que je peux dire. Je me suis à me contenter de si peu dans la vie après 6 ans de survie… du moins, sauf avec toi. Est-ce que ce serait égoïste de dire que je veux qu’on se voit plus souvent ? Que nos journées soit à répétition car je ne m’en lasserai jamais ? On pourrait être dans une pièce sans fenêtre, à regarder le plafond, sans aucune notion du temps, je ne m’ennuierai jamais.

«  Est-ce que d’avoir plusieurs vœux ça compterait ? Ricanais-je tout en prenant une nouvelle gorgée de ma bière. » 

Je sais qu’il attend à une réponse sûrement plus clair. Pourquoi mes vœux semblent vouloir se tourner envers toi principalement? Le reste de ma vie me suffit, tandis que ma soif de toi ne s’arrête jamais. Quitte à me laisser ce goût amer en bouche malgré l’orge. Une petite lueur sombre passe dans mon regard alors que je regarde le ciel.

«  J’en ai clairement trop, je pense à mon cousin que j’aimerais revoir, mais là, tout de suite, je te dirais… que la nuit ne s’arrête pas. »

C’est vague non ? Peut-être que ça parait nulle ? Mais j’aimerais que cette nuit soit infinie pour toi et moi. Je suis si incertaine de tout… de moi… de tout ce qui se passe… Je ne sais pas Erik. Je finis par le regarder de nouveau, de la tête aux pieds, sa tenue, ses cheveux, son sourire, ses gestes, sa personnalité… y a rien qui ne me plait pas chez toi. Je suis contente de te connaître, vraiment. Et qu’on soit ici. Que tu ne m’ai pas dit que tu étais trop fatigué pour continuer et que tu aimerais aller te coucher. Je termine ma bière cul sec avant de la déposer au sol à mes pieds.

«  Et toi, c’est quoi ce fameux vœu numéro 2 que tu aimerais faire ? »

"Plusieurs vœux ? Je crois que c'est illégal, de demander plusieurs vœux en tant que vœu-"

Je lui souris. Tu me douilleras pas comme ça, Nana. Au contraire. J'ai envie de tous les connaître. Pas de pot. Ce qu'elle est belle, quand elle sourit. Ce qu'elle est belle bordel. Son cousin. Ouais. Normal. Sa famille. La raison pour laquelle elle a jeté 6 ans de sa vie. Celui qui lui a sauvé la vie, y a pas si longtemps, avec un simple coup de fil. Je souris. C'est vraiment adorable, et mignon, de penser aux autres avant soi, dans ces moments là. Et la suite de sa phrase me fait sourire encore plus.

"Ah oui donc tu me voles mon premier vœu, comme ça, sans scrupule ? "

Mes lèvres viennent contre les siennes et on reste comme ça un moment, laissant sur nos visages des sourires lourds de sous-entendus.

"Ça me touche. Et ça dépendrait seulement de moi, je te l'accorderais sans aucune réserve, sans aucune hésitation."

Nouveau baiser, moins tendre. Plus brut. Passionné. Doux, mais intense. Puis on se décolle quand elle met un peu de distance entre nous. J'allume une nouvelle cigarette et, sentant son regard sur moi, je me tourne pour lui faire un clin d'œil taquin.

"Mon vœu numéro deux, hein ? Ça serait tout simple-"

C'est faux. C'est pas du tout la vérité ça serait super complexe. Mais tranquille hein. Non. Enfin. J'inspire, mon regard bleu dans ses yeux d'or.

"-ça serait que, toi et moi, on puisse revenir sur cette promesse, si on en
a envie. Qu'on en discute ensemble. Parce que j'comprends pas ce qu'il se passe, okay ? "

Je jette/lâche ma bouteille vide à côté de celle de Nana, l'amortissant avec un peu d'eau quand mes yeux brillent, et j'en ouvre une nouvelle, faisant sauter le bouchon en la sabrant avec la rambarde, avant de m'adosser à celle-ci, les avants bras sur sa bordure.

"C'est peut-être un peu nul, comme vœu. Un peu égoïste."

«  Je le vole ou alors on partage juste la même pensée… »

On se laisse bercer par la tendresse d’un baiser qui dure et qui nous fait chavirer. Le bonheur de n’avoir personne aux alentours pour partager ce doux moment sans aucune limite. On ne peut pas s’empêcher de sourire tout en se regardant. Je lâche un petit rire à sa réponse avant que la passion cette fois-ci nous enflamme et qu’elle nous consume si vite de l’intérieur. Ses lèvres douces et chaudes contre les miennes sont addictives… L’univers complet s’efface dès qu’elles me touchent et qu’il n’y ai pas besoin de mots pour se parler, nos corps le font tout seul.

Puis, on se sépare un peu quand je dépose ma bière à terre, mon mégot trempé au fond. Je lui ai demandé son deuxième vœu par curiosité… m’attendant à… en fait je n’ai aucune idée. Mais je l’apprends vite quand je m’allume une nouvelle cigarette et que le sujet que je voulais contourner se dépose sur la table… au fur et à mesure que je l’écoute mon sourire disparaît à moitié. Vraiment ? Ici ? Tout de suite ? Est-ce que c’est vraiment nécessaire ? J’ai mal au ventre soudainement. Je sais pas quoi dire et une panique me prend aux tripes.

« Égoïste je… pense pas mais… »

Je laisse une petite pause, croisant mes bras sur ma poitrine, la clope au bout d’une main. Je me frotte la tempe de l’autre. Confuse.

« J’imagine qu’on peut en discuter ‘fin… je sais pas… qu’est-ce que… »

Je suis si hésitante. Ça tourne trop d’un coup dans mon cerveau. Je croyais que le restant de la soirée resterait doux. À son regard, il a besoin de parler. Je peux pas tant l’empêcher… Je m’étais habituée à contourner ce sujet mais là… Putain et je soupire si fort putain je sais pas quoi me dire, finis ta phrase meuf.

« Qu’est ce que tu comprends pas ? »

Dès la seconde, où ça quitte mes lèvres, cet arrière goût amer me prend le palais en otage. Je sens que je vais regretter d’avoir posé cette question. Les battements de mon cœur viennent me tamponner les tympans parce que j’angoisse d’aborder ce sujet. Pourtant au tout début où je l’ai fait cette putain de promesse, ce n’était pas si difficile. C’était innocent, sans arrières pensées. Putain. Pourquoi l’air est si lourd dans mes poumons, que mes doigts se crispent. Pourquoi je me sens si mal, ayant l’impression que le sol va s’effondrer sous mes pieds ? Pourquoi surtout je ne me laisse pas réfléchir une chose à la fois et que mes pensées font un pogo général là dedans ? C’est quoi cette peur de merde qui me bouffe si soudainement ? On avait dit qu’on regarderait les étoiles Erik.

J'sais jamais quand j'dois vraiment pas mieux fermer ma gueule moi hein. Son attitude. Sa posture. Son regard. Même le ton de sa voix. Tout a changé. Et c'est ma faute. J'ai comme on dit, "niqué l'ambiance" putain. Vraiment. Je sais très bien que c'était une idée de merde. Pourquoi est ce que j'm'attache aussi vite ? Pourquoi est ce que j'ouvre ma gueule on se connait si peu putain. Vraiment je suis le roi des cons c'est pas explicable autrement une connerie pareil hein.

J'inspire. Prends une gorgée d'alcool et, encore, une bouffée de fumée. Mon pouce court sur le goulot de la bouteille et je regarde le ciel au dessus de moi. J'ai envie de prendre sa main, de la rassurer. Mais. J'ai peur. Peur de la faire fuir encore plus vite. On dirait un chaton effrayé. Imprévisible. Tendu, remonté comme une corde d'arc à poulie, ou d'arbalète. Prête à sauter. À claquer. À blesser. Son soupire m'arrache une partie de mon âme et, alors que j'allais répondre, je n'ose plus. Bordel. C'est cruel, Nana. De donner l'impression de vouloir réellement discuter. Putain. C'était un vœu hypothétique merde. C'était pas une obligation. Plutôt une invitation à la discussion, si tu te sentais prête, Nana. Je ne voulais rien t'imposer. J'ai comme un vide, dans ma poitrine. Si j'étais pas déjà étoile, je crois que ça serait arrivé maintenant, tellement je me sens mal, de te mettre dans cet état. Bordel. C'est pas comme ça que je veux te mettre. Je veux te faire sourire. Plus que tout au monde. Alors hein quoi ? Je sais pas hein. Moi je veux juste discuter. Je veux comprendre. Mais je pouvais attendre. Je crois. Je ne m'attendais pas à cette réaction. Sinon je n'aurais rien dit du tout...

"Tu es certaine de- Bon. Ok. Ecoute. Je voulais juste te proposer d'en parler tranquillement. C'était pas une obligation du tout. J'voulais- Je sais pas. Comprendre pourquoi toi et moi c'est comme ça. Pourquoi on passe d'aussi bons moments. Pourquoi on arrive pas à en profiter plus, alors que c'est déjà tellement, mais alors tellement bien. Tellement mieux que le reste. Qu'avec les autres. Pourquoi on se comprend, pourquoi on se complète. Pourquoi- Putain. Désolé. J'ai pas réussi à oublier, okay ? Pourquoi on ferait n'importe quoi l'un pour l'autre, Nana. Alors qu'on est pas capable de mettre des mots sur ce qu'on ressent ? "

Je sais pas quoi rajouter. Quoi dire de plus. Je n'ose pas parler. J'ose à peine respirer. Putain. J'ai besoin de toi, Nana. De manière générale. Dans ma vie. Mais aussi dans l'immédiat. J'ai besoin de savoir ce que tu penses de ce que je viens de dire. Je sais même pas comment l'interpréter moi-même putain.

Je les entends ses mots. Je les comprends. Mais ils se frappent dans ce mur invisible de mon esprit qui ne me laisse pas process le bordel. Je t’entends, Erik. Putain je t’entends si fort en moi alors que je continue à voir nos moments. Je lis sur ton visage que j’ai peut-être mal réagi. Enfin. Est-ce que c’est juste moi le problème ici ? Ce n’est pas tant que je suis obligée… enfin… oui mais peut-être qu’on est mieux de se dire les choses maintenant car ça monte tellement en crescendo. Ce soir. On s’est tenus la main si longtemps, Megumi qui me faisait des clins d’œil… cette phrase qu’on s’est dit… En parler ne semble pas tant une mauvaise chose pendant que mon corps me crie autre chose. Putain. Je dépose ma bière encore pleine au sol pour recroiser mes bras, serrant de mes doigts mes épaules alors que je me laisse tenter par une nouvelle bouffée de ma clope.

«  Nan mais sûrement que t’as raison et qu’on doit en parler… mais si ça devait me saouler d’en parler je l’aurais juste dit. Alors… du coup… »

Putain meuf. Essaye d’avoir une pensée claire pour changer, je sais pas. Il te regarde et t’es là comme une imbecile a pas savoir où te mettre, à te tenir comme si t’avais une envie pressante de pisser alors que t’es juste crispée par le stresse.

«  Je le sais pas Erik vraiment… »

Comment ça tu le sais pas ? Je sais bien que bon côté relation t’es vraiment nulle mais là, c’est de l’abus de vouloir répéter ça putain. Je regarde mes pieds, incertaine.

«  C’est vrai que ce qui se passe entre nous est en train de déborder… d’être une force plus forte que nous. Je comprends pas tant non plus pourquoi ça se passe si bien… pourquoi… »

Pourquoi je perds le contrôle de moi-même quand tu es à côté ? Qu’à chaque chat que je vois passer dans Terrae, je pense à toi. On s’est vus que trois fois. TROIS. En deux mois. Déjà deux mois. Je comprends pas tant non plus alors que j’aimerais juste avoir la chance de voir ton visage s’illuminer. Je suis à deux doigts de m’arracher le cœur de la cage thoracique il bat trop fort et trop vite ça me donne le tournis sous ce ciel sombre, cette distance soudaine entre nous. Je reconnecte mes iris aux siens.

«  Je n’ai pas les mots non plus Erik… je sais pas ‘fin… je comprends que c’est moi le problème, c’est moi qui ait mis cette promesse en place… Je pensais juste que… »

….
Je jette ma clope dans la canette vide.

«  Que ça éviterait les brisures. Je pensais pas que… ce qui nous relie serait si fort. Je comprends rien non plus mais je voulais éviter d’y penser pour qu’on continue à se voir… »

Est-ce parce que, égoïstement, j’ai voulu m’imposer une barrière pour ne pas tomber parce que dès le premier soir c’était trop parfait ? Qu’on a connecté immédiatement avec une tendresse qui s’est installé si subitement entre nous… Je veux passer mon temps avec toi Erik mais il y a ce pied, le mien, qui reste un pas en arrière et me tire par le bas du teeshirt comme un enfant qui tire celui d’un adulte. Si je n’avais rien dit ce jour là… peut-être que tout aurait changé. C’est juste moi le problème finalement, et je traîne Erik avec moi au fond du puit.

Hey hey doucement, doucement Nana. Vraiment. C'est pas la peine de paniquer, c'est pas la peine de stresser. On est tous les deux dans cette situation de merde. C'est pas grave. On en sortira tous les deux. C'est même pas tant une situation de merde en plus. Genre c'est vraiment faire chier sur les détails. Je m'en fiche qu'on ai pas d'étiquette sur le front ou j'sais pas quoi. Ce qui compte c'est toi. Je ne peux pas m'empêcher de sourire, d'essayer d'être rassurant comme je peux. La seule chose que je n'ose pas, c'est te toucher. Te prendre la main. Te serrer contre moi. J'ai peur que ça. Que cette preuve d'affection nous fasse tomber en morceaux.

Je la laisse parler. Je la laisse chercher ses mots, s'exprimer maladroitement. Comme moi. Vraiment, je ne te juge pas le moins du monde, Nana. Et putain même dans cette situation j'arrive à te trouver belle, okay ? On est dans la même situation. On est ensemble là dedans et on en sait pas plus l'un comme l'autre. Enfin. Si. Moi je sais. Mais j'ose pas le dire. L'avouer. On se balance des "je ferais n'importe quoi pour toi" mais on est incapable d'accepter ce que ça implique. Et c'est normal. C'est pas nul, c'est pas grave. Il y a une seule chose que je n'accepte pas, c'est que tu dises que c'est de ta faute. Je me redresse, mon regard dans le sien depuis qu'elle est venue y plonger, au milieu de sa réflexion.

"Nana. Comment ça c'est toi le problème ? Tout le reste je suis d'accord. Qu'on est dépassé par ce qu'il se passe, la peur de dire ou faire quelque chose qui nous empêcherait de nous revoir. Ça je comprends. Mais que tu penses que c'est cette promesse, que c'est de ta faute. Non. T'as pas le droit de dire ça. C'est pas vrai. La preuve, notre soirée se passe très bien, et c'est moi qui dit et fait des choses qui nous sortent de notre zone de confort. Il y a quelque chose qu'on ne comprend pas. Et cette promesse qu'on s'est faite, tous les deux. J'étais d'accord pour m'engager- Je souris en disant le mot, devant son ironie -parce que j'ai vu ça comme une opportunité d'apprendre à mieux te connaître, sans craindre, comme tu dis, les blessures ou les déceptions. Alors, vraiment, c'est pas de ta faute. Et c'est même pas ça, le soucis. Le soucis c'est-"

Je me mords la lèvre. Je noie quelques secondes de ce silence qui nous enveloppe. Putain. Erik. T'es vraiment trop con, de penser que des mots seuls peuvent faire revenir la situation à la normale. Les mots ont déjà fait assez de mal comme ça.

"-le soucis c'est qu'il y en a aucun, des soucis. Et qu'on s'en invente pour pas regarder la vérité en face. Le soucis c'est qu'on assume pas. J'assume pas ce que tu représentes pour moi. J'assume pas l'affection. La douceur que j'ai pour toi. J'ose même pas le dire, ce mot, tellement c'est invraisemblable. Tellement c'est rapide. Tellement c'est une évidence. Je-Putain. Nana..."

Je n'ose pas finir ma phrase. Je sais pas pourquoi. Est ce que je la perds tout de suite, maintenant, si je le dis ? Est ce qu'on se verra plus jamais ? Est ce qu'en plus de fuir nos sentiments, on va se fuir mutuellement, si je prononce ces mots ? J'ai trop peur de tout perdre. Parce que c'est ce que tu es, dans mon esprit. Dans mon coeur. Tout.

C’est si drôlement con quand tu le dis Erik, s’engager mais à ne pas s’engager au final. T’as attendu que je vomisse mes mots avant de tenter de me répondre alors qu’on est si perturbés par la situation. T’essaie de me faire croire que la balle va dans les deux camps. Putain je suis vraiment con. Pendant qu’il me parle je suis immobile, respirant fort du nez pour m’obliger à prendre de l’air sinon je ne le fais pas, mon angoisse est bien trop forte sur le moment. Je comprends pas pourquoi c’est si intense et qu’on se complexe. Qu’est-ce que j’attends de toi Erik. À la base rien. Mais en peu de temps, tu m’as donné envie de parcourir des kilomètres si je devais te retrouver. Je t’entends, Erik. Cette vérité qu’on semble avoir tous les deux et qui me fait subitement froncer les sourcils. Putain.

Sur ses derniers mots je me mets à faire les cent pas dans cet espèce d’aller-retour mécanique, croisant encore les bras. Qu’est ce que je suis supposée répondre à ça putain.

«  Erik, je sais pas quoi en penser de tout ça. »

Pourquoi tu laisses le mensonge te brûler les lèvres comme ça meuf ?

«  Enfin, ouais ‘fin, ça va trop vite dans mon cerveau ok ? Puis en soit c’est pas la fin du monde de sortir de sa zone confort mais c’est si difficile…. ‘Fin… J’ai ma propre barrière qui me fait garder ce mur de verre et qui m’a fait dire ‘pas d’engagement’ parce que…. Je sais pas…. qu’on se cache ce qui traine en dessous ? »

Je continue de faire mes pas tandis que je reviens masser une tempe.

«  Non merde je sais pas ce que je dis. Le but c’était pas de se prendre la tête c’était juste d’avoir des moments ensemble et je sais pas j’ai paniqué Erik, ok ? J’ai plus l’habitude de tout ça depuis longtemps et j’essaye de m’effacer du paysage alors que je suis pas capable de me gérer. J’ai paniqué devant autant d’affection si soudaine alors que ça me rend toute chose et que je me laisse pas rien process pour pas être blessée. Alors que… P’tain Erik pourquoi c’est si dur ? J’ai un putain de voile dans la gueule et j’ai la vue floutée sauf quand t’apparais dans mon champ de vision. On est dans cette conversation qui me parait si lourde, on a ces mots qui nous empêchent d’être direct. Je voulais qu’on se voit plus souvent et je faisais aucun effort pour venir te chercher parce que peut-être tu voudrais pas me revoir, c’est con un peu. Ça a évolué si vite, 3 rendez-vous en deux mois, c’est tout ce qu’il a fallu… »

Je prends une grande inspiration parce que je manque d’air à ne pas vouloir respirer entre deux phrases.

«  Je suis pas capable d’aller de l’avant putain… »

Mes pieds, ne s’arrêtent pas, de bouger. Je ne les contrôle pas. En vrai y a plus rien que je contrôle.

«  Tu m’as demandé au restaurant si j’étais sûre qu’on ne se cachait rien… ‘fin… »

J’ai la gorge qui se serre doucement dans un élan de ne pas laisser mes émotions m’emporter parce que je le sais pas ce que je pense… mais les mots ne viennent pas tout de suite…

«  J’ai peur de lâcher prise Erik. Je suis désolée. »

Et si je lâche, seras-tu là pour me rattraper ?

C'est son tour à elle de s'exprimer. Peut être qu'elle y arrivera mieux que moi. Ça peut difficilement être pire de toute façon. J'ai essayé d'aller au bout et j'ai pas réussi. Peut être que toi tu peux le faire. Même si j'en doute, parce que je pense que si c'est toi qui a posé cette barrière entre nous, aussi inutile soit-elle, c'est toi qui l'a posé quand même. Ça se confirme, au fur et à mesure de ce qu'elle dit. Et en même temps je sens mon coeur qui s'emballe quand elle dit qu'elle me voit malgré le flou du monde, qu'elle veut me revoir même si elle ose pas faire le premier pas, parce qu'elle a peur que je la rejette. Je m'allume une clope. Encore, ouais. Heureusement que j'ai essayé d'arrêter parce que ça se voit pas. La peur de lâcher prise. Nana.

"Lâcher prise sur quoi ? Sur toi même ? Tu viens toi même de parler de rendez-vous, en parlant de. De nos rencontres. De nos moment rien qu'à nous. Et en quoi l'habitude change quoi que ce soit, vraiment. J'ai absolument pas l'habitude de- de ressentir ça. De vivre ça. J'ai eu une fille dans ma vie, tu sais, alors les sentiments et tout ce qui s'y rapporte, j'y connais rien."

Je marque une brève pause. Ça sonne comme des reproches, ou comme si on essaie tous les deux de s'accuser, de se blâmer nous même plutôt que l'autre se sente coupable. Je la regarde continuer de marcher sans but.

"Cette peur de lâcher prise, Nana. On peut faire avec. Moi non plus j'ose pas venir vers toi. Bon. Je l'ai fait pour t'inviter ce soir. Mais j'ai eu si peur de t'embêter. Si peur que tu me ris au nez. Vraiment. Sans ton cadeau de l'autre fois, j'aurais pas osé. Je veux être transparent avec toi, moi aussi. Que même malgré ce plafond de verre tu vois ce qu'il y a dessous. J'ai envie de passer plus de moments avec toi. Tellement plus. Mais si il t'en faut, du temps, alors je te le laisse. Je veux pas qu'on se brûle les ailes à voler trop près du soleil."

Disant ça, je m'approche doucement d'elle et attrape ses mains.

"Est ce qu'il y a quoi que ce soit que je puisse faire pour toi ? Pour nous ? "

Aucune idée de ce que je raconte. Je  tourne autour du pot sans cesse. Dans un but non-existant où mes mots ne font pas de sens dans ma bouche et me fait claquer la langue sur mon palais comme une imbécile. Erik je sais pas putain. Je me bats à l'intérieur pour comprendre. Pour essayer d'avoir cette conversation avec toi dans ce moment si sérieux qui n'avait pas lieu d'être ce soir. C'est ton anniversaire et on est là à se balancer la balle, c'est pire que du tennis cette histoire. Erik est tout autant paumé que moi. On tente de démêler un nœud qui se serre un peu plus à chaque tentative de vouloir le défaire. Ce que tu dis rentre dans une oreille mais ne sort pas par l'autre. J'ai peut-être trop réagit pour rien. Non? L'angoisse putain. Mais si ça le saoulerait, il serait parti non? Il serait parti en trombe de ce toit me laissant sous ce ciel sombre. Ce goût amer dans ma bouche devient de la javel. Ça me pince si fort de l'intérieur, mes entrailles s'entremêlent dans un mouvement chaotique.

Chaque nouveau mot qui sort de sa bouche me ramène un peu plus vers le coin sombre qui se cache dans mon cœur. Qui refuse de voir la lumière alors qu'un simple baiser de ta part et le brouillard se désépaissit. Quand ses mains prennent les miennes, mes pieds se stoppent subitement. L'émotion dans son regard me fait vibrer au point qu'il devienne mon point de gravité, que mon âme souffle son nom au creux de mon oreille. Putain. Ne me lâche pas, s'il te plaît.

« Putain, riais-je nerveusement, c'est vrai que j'ai dit 'rendez-vous'... »

Bien sûr que je l'ai dit... Mes mains embrassent les tiennes, et c'est si chaud, si doux.
Du temps. On en eut du temps et il n'y a que moi-même qui me retient d'aller à ta rencontre : c'est si contradictoire alors que je te réclame pour moi... Je revois ton nez se frotter au mien au lac. On s'est laissés tomber dans les bras l'un de l'autre non?

« Je t'avoue que j'étais si heureuse que tu m'invites... La seule chose que tu peux faire, c'est d'être ici avec moi. Je crois que... j'ai besoin d'un coup de bélier contre la vitre. Ce serait avec plaisir de se voir plus souvent... Qu'on brave notre peur de l'autre pour... 'fin... être ensemble plus souvent. »

Doucement, les mots font surfaces. Ça me fait peur, que ça sorte, je pourrais juste me retourner et partir. Me téléporter dans ma chambre et m'enfermer quelques jours. On se tourne autour incessamment, on a des comportements que de simples plans cul ne devraient pas avoir. Parce que finalement, on ne l'est pas. Cette recherche sans fin d'assouvir notre faim de l'autre... Nos mains qui s'amusent à se joindre naturellement, le sentiment de retrouver une partie de son âme chez quelqu'un d'autre... De se comprendre. Ma gorge se serre un peu plus fort alors que je ne peux pas le lâcher du regard, mes yeux s'humidifient doucement.

« J'm'en fous de me brûler les ailes Erik si je peux voir le monde à partir de tes bras. C'est con un peu, non? -un léger filet coule sur ma joue- C'était véritable quand j'ai dit que je ferais n'importe quoi pour toi, je sais pas comment c'est possible mais tout ce que tu fais, simplement que respirer, ça me contente. C'est effrayant ce qui nous arrive, mais merde, on aurait pu crever en mission je comprends pas pourquoi la peur me retient comme ça. J'ai laissé de côté si longtemps ce que peut être l'amo- »

Je me fige. Ça sort, en force, oh la. Je lâche ses mains soudainement pour me reculer de quelques pas.

« OK, attends- Je. Non je crois que je suis mieux d'y aller. »

Oh non c'est la panique, ALERTE ROUGE. A.L.E.R.T.E. Je secoue mes mains devant moi dans un geste de panique.

« Attends pardon non c'est pas ce que je voulais dire, 'fin... OUBLIE. »

C'est fini... c'est ça? Il va refuser et il va se barrer parce que j'ai glissé sous le coup de l'émotion. Je vais l'effrayer. C'est le bordel, où est ce foutu parachute de secours dans ce genre de situation??

Elle s'est arrêté. En face de moi. Quand j'ai pris ses mains. Son regard me transperce. J'hoche la tête quand elle parle, et je retiens mon souffle quand je vois quelques gouttes perler de ses yeux. Nana...

"Tu dis ça parce que c'est mon signe astrologique ? J'ai envie qu'on passe du temps ensemble. Ok ? Je ne partirais pas. Je ne te ghosterais pas. Je suis là. Pour toi. Dans tous les sens du terme. Je suis là si tu as besoin de quoi que ce soit. Parce que tu es toi. Parce que tu es Nana, la jolie Téléporteuse au regard de feu'. La Tonnerre la plus douce de Terrae."

Les perles grossissent et se rejoignent, roulant sur sa joue. J'aurais envie de l'essuyer, mais ça impliquerait de lâcher ses mains si chaudes, si douces. Et je m'y refuse. Alors mes yeux brillent un instant, sans quitter les siens, et la larme s'évapore, laissant de minuscules gouttelettes dans son sillage. On aurait pu crever en mission, oui. C'est vrai. C'est vrai et- Elle recule d'un pas, brisant ce lien entre nos doigts. Puis d'un second et je m'attends à la voir disparaitre.

"Aller- Ok. Je t'attends ici ? "

Elle essaie de se rattraper. De retirer une fois de plus ce qu'elle voulait dire.

"Ça marche plus, d'oublier. Vraiment. Je peux plus. Chaque moment avec toi reste dans ma mémoire. Si tu veux voir le monde à partir de mes bras, ou sur mes épaules. Moi, je découvre tout un univers entre les tiens. Je n'ai pas peur de ce que tu dis. De ce que tu fais. Je n'ai pas peur de toi, ou de mes sentiments. J'ai peur que ça s'arrête. Qu'on laisse mourir ce petit morceau de bonheur. Si tu veux partir. Si tu en a besoin. Peut importe. C'est ta décision. Et je la respecte. Et ça ne veut pas dire que- enfin. Que- que c'est fini ? Si ça a commencé. Je sais pas. Même si la seule chose que je peux faire, c'est être avec toi, ici. Je comprends que ça soit pas le moment. Mais je serais là, ici, pour toi."

Je veux juste la prendre dans mes bras. Lui dire que je suis là. Mais elle l'a dit elle même. Même si elle veut pas. Inconsciemment. Une partie d'elle veut fuir. Et je lui donnerais pas l'opportunité. Pas le prétexte de le faire. Je lui dit qu'elle peut le faire.

"Écoute. J'en ai rien à faire de cette promesse. Moi, Erik. C'est moi. Coucou. Je m'engage à prendre soin de toi de la manière que tu considères la plus appropriée à notre situation. De ne plus te cacher des choses par peur de te faire du mal, par peur de comment tu pourrais l'interpréter. Je m'engage à être là pour toi. Et à être pas là, pour toi aussi, si je suis trop collant ou je sais pas. Est ce que tu veux une cigarette ? "

J'ai faillit terminée cette phrase différemment. Putain. Ne pars pas s'il te plaît. Ne me laisse pas tout seul avec tout ce qui tourne dans ma tête. Tout ce qui tourne autour de toi putain. Toute mes pensées sont tournées vers toi..

C'est le bordel. Comment il peut être si calme alors que je suis à deux doigts d'imploser comme une supernova. Je dis de la merde et j'encourage à vouloir oublier, alors que c'est pas le point. J'ai le cœur au bord des lèvres. Je viens placer mes cheveux derrière mes oreilles tout en l'écoutant. T'es si compréhensif Erik, pourquoi tu cherches à rester... Mon ventre se plie devant tes mots et la douceur qu'ils transpirent. Moi aussi j'ai peur que ça s'arrête, tu sais. Les seuls fois où on a dû se quitter, c'était une torture. Rien que la première nuit... Quand tu allais partir et que je me suis interféré. Bordel. Je veux pouvoir te rassurer moi aussi... Prendre sur moi et être une putain d'adulte qui ne veut pas s'enfuir de ses problèmes. Je m'en pince les lèvres presque à sang. Est-ce qu'on peut dire qu'on a commencé quelque chose inconsciemment? Tout était différent à la seconde où on s'est rencontrés hein... C'était si bizarre et quand on a prit vraiment le temps... que tout s'est connecté, on l'a ce point de départ. Cette ligne à moitié effacer qu'on a vu inconsciemment, mais qu'on a décidé d'ignorer. Tu parles et j'ai le cœur qui n'en peut plus d'être en plein marathon.

« Je suis désolée... C'est immature de ma part de crier à tout bout de champ d'oublier alors que ce n'est même pas vrai. J'ai déjà commencé à voir toute une nouvelle galaxie à chaque moment qu'on passe ensemble... Je veux être là pour toi aussi... »

Un long soupir m'échappe alors que mes yeux continuent de s'humidifier. Ces promesses qu'il me dit me font fondre. Intensément. Je regarde mon sac à main à terre et je pourrais... partir... et venir en rediscuter. Quand ça irait mieux. Est-ce vraiment la bonne chose à faire de s'enfuir... Tu mens Erik. Tu me laisserais vraiment partir si subitement? Et tu me proposes une clope putain.  Je ne veux plus rien te cacher non plus, tu mérites le système solaire au complet, ton nom gravé en moi. Je m'haïs de pas pouvoir m'exprimer correctement et de laisser si longtemps la vérité sur le côté. J'ai reculé de deux pas encore, des larmes un peu plus grosses s'échappent par toute cette affection qui émanent de toi et de tes engagements. Complètement paumée la meuf... Porte tes ovaires un peu. FAIS QUELQUE CHOSE. Tu penses trop. J'ai reculé mais je déteste cette distance que je suis en train de mettre.

« Tu sais quoi... »

Je me laisse me téléporter.
Devant Erik.
Avant de prendre son visage dans mes mains et de lui offrir un baiser rempli d'une passion jamais vue à peine mes pieds touchent le sol. De lui transmettre par mes lèvres tout ce que je ressens alors qu'une autre larme chaude s'échappe par la même occasion, que mon électricité offre ces micro-picots dans mes lèvres. Ça chatouille, ça ne fait pas mal. Je me laisse dériver dans ce baiser qui est si long mais si libérateur, si doux, si... rempli d'amour putain.

Quand nos lèvres se séparent pour respirer, un autre filet vient sur mon autre joue. Nique le mascara hein.

« Je suis désolée… je veux pas te laisser tomber Erik, faut que j’y aille…. »

Ses mots m’arrachent la gorge dans un pleur étouffé. Je m’échappe de sa prise et attrape mon sac d’un geste vif avant de me téléporter dans ma chambre. Sans lui. Lui jetant un dernier regard en essuyant ma joue. C’était trop. J’ai paniqué en effleurant du doigt mes sentiments pour toi, je suis désolée…

Elle s'excuse encore. Pour. À la fois tout, et rien. Bordel. Elle est si adorable mais. Pourquoi je la trouve si belle alors qu'elle pleure. Pourquoi je la fais pleurer putain. Nana. Nana... Les larmes se multiplient. Je ne sais pas quoi penser. Quoi faire. Tout ce que je veux, c'est que tu te sentes bien quand on est ensemble. Et que tu penses à moi quand on est pas ensemble. Comme moi avec toi. Je comprends que ce lâcher prise te fasse peur. Et c'est à moi de te rassurer.

"Alors sois là. Pour moi. S'il te plaît."

Sois là genre. Là là. Pas là là-bas. Et, comme si tu m'entendais. Comme si tu comprenais mes mains tendues vers toi. Tu te téléporte. Des larmes coulent sur tes joues alors que les miennent sont couvertes par tes mains lorsque tu viens me donner ce baiser. Ce baiser c'est. Tout. Ce que j'imagine quand je pense à toi. Ce que je désire plus que tout au monde. Cette passion. Cette tendresse. Ce désir, charnel mais aussi affectif. Cet amour. Je n'ai pas besoin de mots. Je n'ai pas besoin que ton cerveau le réalise. Ton corps le communique pour toi. Et le mien le fait pour moi, pendant que je te rends ce que tu me donne. Je t'aime bordel. Comprends le. S'il te plaît. Je n'arrive pas à le verbaliser. Ça ne passe pas mes lèvres mais putain, ça les imprègne. Cette électricité entre nous, je la sens si forte. Tu es tellement farouche. Et pourtant tu es là. À m'embrasser comme si nos vies en dépendaient. Je t'aime Nana. Comprends le. S'il te plaît. J'ai besoin de toi dans ma vie. J'ai besoin de toi pour me sentir en vie. Sans tes lèvres, je ne suis plus qu'un réceptacle, sans vie. Tu fais battre mon coeur plus vite. Non. Tu le fais battre tout court. J'aurais pu mourir, il y a pas si longtemps. Pour mes convictions. Pour Terrae. Pour mes amis. Mais je ne veux plus. Je veux rester en vie pour rentrer auprès de toi.

Nos lèvres se séparent, et ma main glisse sur sa joue pour en chasser les larmes. Puis ce sont plus que nos lèvres qui s'éloignent. Et en un clin d'oeil, tu n'es plus là. Nana ?

"NANA-"

Je sens mon monde entier vaciller. Je ferme les yeux, de toute mes forces, et les réouvre sur. Rien. Tu n'es pas là. Ma main glisse dans ma poche, comme a chaque fois que je pense à toi et que tu n'es pas là. Putain. Nana. J'ai dit que je t'attendais ici mais. Non. Juste non. Je visualise cette chambre. Cette rose fanée, sur la commode, sous la fenêtre. Ton sourire. T'es yeux. Et, comme à l'entraînement avant la mission. Je me téléporte.

"Nana ? "

J'entends un bruit. Le temps de prendre mes repères. Nana ? J'entends un bruit étouffé. Dans la salle de bain. Un sanglot ? Je frappe doucement à la porte.

"T'es pas obligée d'ouvrir. Mais je suis là-"

J'attends un peu mais la porte ne s'ouvre pas. Alors je m'y adosse et me laisse glisser doucement jusqu'à être assis par terre. Qu'est ce que je branle. Si elle part. J'ai tout perdu. Elle et ce cristal.

À peine arrivée dans ma chambre, j’ai la tête qui tourne. Je balance mon sac sur le lit et laisse par terre ma veste alors que les larmes fusent. Putain mais qu’est ce que je suis bête. J’ai fini par le laisser seul sur ce toit en pensant que ça allait régler le problème… j’ai paniqué. Je lui ai pas laissé le temps de parler et je suis partie comme une voleuse. Comment est-ce que je fais maintenant si je le revois ??? C’était le baiser de trop… celui qui a ouvert les valves de mes yeux qui ne veulent plus se stopper. Ce baiser qui a détruit toutes mes défenses. Et maintenant il va me haïr. Je voulais te promettre de ne jamais te laisser et j’ai déjà fail. Putain.

Je me rue dans la salle de bain, claquant la porte de toutes mes forces. Penchée devant mon lavabo, j’essuie du bout des doigts les tracés noirs de mon maquillage formé par mes pleurs. Pathétique. ÇA NE S’ARRÊTE PAS PUTAIN. Ma douleur est trop forte, elle se mélange à tant de choses… à mes échecs et celui que je suis en train de faire alors que tout était parfait. Enfin. Presque. Il ne manquait plus que la prise de conscience au final… ce qu’on tentait de ne pas penser mais dont nos comportements faisaient déjà le boulot. Notre addiction à l’autre est trop puissante. Ça me fend le cœur et mes pleurs sont un peu plus bruyants. Me laissant penser par la même occasion à ma tentative sur le toit à la sortie de l’hôpital. Je me suis convaincue que je pouvais avancer mais je me remets en doute. Erik… j’ai besoin de toi et je m’en rends compte maintenant plus que jamais. Est-ce que je suis mieux de retourner tout de suite sur le toit pour savoir s’il va bien ???? Je suis partie y a peu et- ça cogne. À la porte. Mon cœur s’arrête de battre quand j’entends la voix d’Erik. Comment ? COMMENT TU ES ARRIVÉ SI VITE ?? T’AS COURU OU QUOI ?

Je me rapproche de la porte, déposant ma main contre le bois. Je sais pas si je serais capable d’affronter. J’ai envie de vomir. Merde. Ma bouche s’ouvre mais aucun son ne sort tout de suite. Merde. Merde. Merde. Merde.

« Erik tu… Comment tu-. »

Une lumière me traverse l’esprit.

« Le cristal. Tu l’as utilisé c’est ça ? C’est dangereux putain t’aurais pu te retrouver je ne sais où ailleurs… »

Je suis pas très bien placée pour donner la leçon en ce moment je pense. T’es là. Putain t’es là, je devrais être contente mais est-ce que ce n’est pas pire. Je me casse, je te blesse et t’es derrière ma porte. Ma respiration est saccadée, les poumons lourds et les joues trempées. La porte n’est pas fermée à clé, mais je n’ose pas t’ouvrir pour autant.

« Je voulais pas-… putain, tout ça… j’y arrive pas je suis trop en panique je sais pas quoi faire ou dire. »

Je fais une légère pause.

« Dis… pourquoi tu m’as suivi Erik…? Je t’ai abandonné comme une lâche…. POURQUOI tu ne me cries pas dessus comme n’importe qui le ferait ??? »